Suite à la publication de l’interview du Président de la Cour des compte, dans
le journal Sidwaya n°8076 du 12 janvier 2016, l’ancien Contrôleur financier, Pamoussa Kaboré a réagi à travers cette déclaration. Il appelle à un audit de la gestion du régime Compaoré et de la transition.

PAMOUSSA
J’ai été réjoui hier matin en lisant beaucoup de journaux dont notre « sidwaya national », titré entre autres : « gestion des biens publics, le Chef de l’Etat demande un audit de la transition ».
Ma joie est réelle car si l’audit est fait et bien fait, mes doutes sur les recours abusifs des gré-à-gré seront levés. Je pourrai alors m’excuser auprès de ceux que j’aurai peut-être blessés sans le vouloir. Le plus important, ce serait surtout l’occasion de mettre en pratique le slogan « plus rien ne sera comme avant ». Cela constituera assurément à mon humble avis le meilleur départ possible pour une bonne gouvernance de notre pays.

Cela tranchera effectivement avec les situations d’avant où après une mauvaise gouvernance, les auteurs étaient récompensés, promus comme le fût « le beau frère national », Monsieur Lucien Marie Noël BEMBAMBA.

Mon intervention comportera deux parties :
-Les sanctions de la mauvaise gouvernance sous l’ancien régime ;
-La nécessité de l’audit, ses bienfaits pour les audités eux-mêmes et pour le pays.

1°) Les sanctions de la mauvaise gouvernance sous l’ancien régime
Je m’appuierai surtout sur la gestion au Ministère de l’Economie et des Finances par monsieur Lucien Marie Noël BEMBAMBA depuis 1997 jusqu’à son départ précipité.
Monsieur Lucien Marie Noël BEMBAMBA « débarque » au Trésor public avec comme diplôme « avoir épousé la sœur du Président. Il entreprend des réformes « diaboliquement géniales ».

Dans un premier temps, tous les agents publics qui ne pensent pas comme lui, il les « chasse ». Certains cadres se rangent, ils décident de servir Monsieur Lucien Marie Noël BEMBAMBA et non l’Etat qui a pourtant fortement contribué à leur succès. Ils décident consciemment de « réfléchir par le ventre » et non par la tête comme voulu par DIEU. Même étant Directeur Général du Trésor et de la Comptabilité Publique (DGTCP), il semblait fortement influencer toutes les décisions de l’ensemble des secteurs du Ministère des finances. Qui est fou pour être en désaccord avec le « beau national » ? Monsieur Lucien Marie Noël BEMBAMBA, en bon stratège, s’est donné tous les moyens pour réussir sa « mission » et il ne prend aucun risque par rapport à celui qui ose le contredire:
-Il crée une structure appelée Direction de la Législation Financière (DELF). A l’époque, certains cadres du Ministère avaient trouvé cela bizarre ; car il ne revient pas au comptable public (qui est un exécutant) d’initier ou de relire les textes à caractère financier. Cette prérogative revenait de droit au Ministre en charge des finances, qui est l’ordonnateur du budget.

Des errements du ministre BEMBAMBA

Mais ici, il s’agit du beau-frère du Président. Après avoir « chassé » les « empêcheurs de tourner en rond » du Trésor ; il revisite tout le dispositif mis en place par l’illustre Ministre des Finances et du Commerce que fût l’intendant militaire Tiémoko Marc GARANGO. Monsieur Lucien Marie Noël BEMBAMBA revisite toute la règlementation dans son propre intérêt ou de celui de son clan. Il démantèle tout le dispositif juridique initialement mis en place pour une gestion efficace et efficiente des finances publiques. Exemple. Le 1er texte sur les marchés publics, c’est un texte de 1970 et la 1ère relecture est intervenue en 1996, soit 26 ans après. Sous l’ère BEMBAMBA, le texte de 1996 a été relu en 2002, 2003, 2008. Le texte de 2008 a été déjà relu deux (02) fois. J’ajoute que le texte de 2002 n’a jamais connu un début d’application. Monsieur « Réforme » a semé un désordre tel qu’aujourd’hui, tout est confus. Sa dernière réforme est la « mise à mort » du Contrôle Financier par la fusion des deux (2) structures que furent la Direction Générale du Contrôle Financier (DGCF) et la Direction Générale des Marchés Publics (DGMP). Monsieur Lucien Marie Noël BEMBAMBA s’arrange pour placer ou faire placer « ses fidèles serviteurs » à la tête de toutes les structures en charge de toutes les étapes stratégiques de l’exécution et du contrôle, qu’il soit a priori ou a posteriori ; comme ce monsieur n’aime pas du tout ceux qui servent l’Etat, c’est-à-dire le bien public. Il exclut tout agent public qui ose lui faire des remarques.
Pour que vous me compreniez bien, sachez que Monsieur BEMBAMBA, « chassé du Trésor » a été promu Ministre Délégué Chargé du Budget. A sa prise de service, il est venu avec tous ses anciens collaborateurs, de la secrétaire au chauffeur ne gardant aucun agent du précédent cabinet ministériel. Convenez avec moi que l’Administration ne doit pas fonctionner comme cela.
Celui qui sert Lucien Marie Noël BEMBAMBA est aussi bien servi et surtout bien servi en promotion (promotion exponentielle). La décence voudrait que toutes ces personnes ayant bénéficié de telles largesses, gardent un profil teinté de toute humilité pour ne pas s’exposer aux révélations de ceux qui les connaissent bien, et même très bien.

Du reste, la bienveillance du nouveau Président du Faso a conduit les corps de contrôle à s’exprimer sur la corruption. Je me réjoui de la déclaration parue au journal sydwaya du 12 janvier 2015 qui rapporte entre autres que « …ne pas travailler et toucher son salaire est une corruption… ». Je saisis donc l’occasion pour suggérer que soient sanctionnés les responsables qui refusent d’accéder au droit des agents à travailler afin que ceux-ci méritent leurs salaires pour ne plus être inscrits aux nombre de ceux qui pourraient être taxés de corrompus pour le fait de ne pas travailler. Je suis disqualifié pour parler des nombreux enseignants qui serraient 4 ou 5 dans une même classe dans les villes, en train de faire le travail d’une seule personne, alors qu’il en manque dans les villages.

De la nécessité de l’audit

Quant à moi, KABORE Pamoussa Joanny, je touche mon salaire depuis 2010 sans qu’il ne m’ai été jamais confié un quelconque dossier par ma hiérarchie : suis-je pour autant dans la corruption ? Je voudrais par là même interpeller les corps de contrôle sur le fait qu’il y a des agents empêchés de travailler, « mis au garage ». Et c’est mon cas ; je ne suis malheureusement pas le seul. Nous sommes actuellement dix (10) agents affectés à un service appelé « Cellule Economique et Financière » du Ministère de l’Economie et des Finances mis à l’écart pour ne pas gêner les serviteurs de Lucien Marie Noël BEMBAMBA. Vous le savez très bien, nous sommes donc sanctionnés sans raison ; si Lucien Marie Noël BEMBAMBA avait une raison si minime soit-elle de nous licencier, il l’aurait fait.

Par ailleurs, pour ce qui concerne toute autre forme de gestion publique, je serai ravi que les corps de contrôle se prononcent davantage sur le respect des normes et procédures plutôt que de faire l’apologie des résultats soi-disant palpables de certaines autorités. Lisez plutôt cet extrait « …à quoi ça sert de passer un marché proprement comme on le dit et au résultat on construit un bâtiment et qui va s’écrouler ? C’est une réalité dans notre pays. On lance un appel d’offres, même les entrepreneurs qui ne sont pas qualifiés se mentionnent et après au résultat, on n’a même pas une bonne école pour y mettre les enfants. C’est la mieux-disance, c’est-à-dire qu’à compétence égale, c’est le prix qui vous départage » (propos du président de la cours des compte parus dans le journal sidwaya n°8076 du 12 janvier 2016, page n°13. Je laisse le soin aux lecteurs d’apprécier de tels propos qui semble dire que les procédures et normes ne servent à rien, voire sont contraires à la recherche de bons résultats). En réaction à la dénonciation des gré-à-gré sous la transition, j’ose comprendre que c’est une défense en ligne…
Tant qu’il y a des résultats, il faut violer la loi. Les procédures sont là pourtant pour assurer la qualité, la fiabilité des résultats.

Appel au président Roch

Dans mon écrit sur les gré-à-gré, j’avais souhaité un audit international pour être sûr que l’audit sera fait, et bien fait. Aujourd’hui, je suis solidaire avec les choix du Président du Faso de confier cette mission aux corps de contrôle nationaux : C’est le défi qu’ils auront de répondre efficacement à cet appel de lutter farouchement contre la corruption et à traquer fermement les auteurs passés, présents et futurs de telles pratiques. Bon courage à vous et retenez que plus rien ne doit être comme avant !

2°) Les bienfaits de l’audit bien fait
a°) Pour les audités eux-mêmes
Cela permettra assurément de fermer « la gueule aux jaloux, aux aigris » qui passent leur temps à crier que les procédures ont été violées alors que ce n’est pas le cas. Ces autorités seront blanchies, honorées. Ceux qui s’étaient trompés en croyant que les textes ont été violés alors que ce n’est pas le cas vont s’excuser ; on se donnera la main et on construira le Burkina dans la paix.
S’il est avéré que les textes on été violés, toutes les conséquences seront tirées et les fautifs devront être sanctionnés comme il se doit. Il semble évident que l’opinion ne comprendrait « aucun arrangement » en vue de protéger qui que ce soit».
Moi, je voudrais comprendre par exemple le bien fondé de la réalisation des travaux en cours pour la construction de la stèle des martyrs des 30 et 31 octobre 2014 qui ont coûtés 1 232 817 154 F CFA TTC (10ème rapport du conseil des ministres du 14/10/2015) par la procédure d’appel d’offres restreint et accéléré. Quelqu’un comme moi qui ne comprends rien dans les affaires, peut penser qu’on a utilisé « l’émotion collective du moment » pour faire de « bonnes affaires ». Vous savez, si on vous appelle à l’hôpital pour assister votre ami ou parent accidenté, vous serez dans une émotion telle que vous oublierez de fermer votre engin. Le voleur profite de cette émotion là pour vous prendre votre engin.
Les gens comme moi pensent que l’urgent à l’époque c’était de s’occuper des blessés, les évacuer au besoin et peut-être que cent millions (100 000 0000) Fcfa auraient suffi. Pour la stèle, on pouvait lancer un appel d’offres ouvert, on aurait garanti la meilleure exécution à un prix avantageux pour l’Administration ; l’inauguration pourrait intervenir plus tard (mi-2016 ou fin 2016).

b°) Pour l’Etat
On peut citer :
-La restauration de l’autorité de l’Etat
-Le rétablissement de l’équité dans les relations entre l’Etat et ses partenaires, et notamment les opérateurs économiques méritants qui pourraient bénéficier eux-aussi des marchés s’ils ont les meilleurs dossiers.
-Le rétablissement d’une Administration républicaine au bénéfice de l’Etat, c’est-à-dire au service de l’intérêt général, du bien commun
-Le rétablissement de la morale dans l’Administration afin que quand on dira que c’est interdit de brûler le feu, que nul ne le fasse. Sur ce point, je vous rappelle qu’un médecin célèbre, un bonze du CDP a déclaré il y a déjà quelques années, que « la morale agonise au pays des hommes intègres ». Est-elle toujours en agonie ou est-elle maintenant morte ? Quant à moi, je pense que la morale est morte dans la majorité des serviteurs de l’Etat puisque les gouvernants ont toujours donné de mauvais exemples.
-Le bannissement du clientélisme, du copinage, de la promotion de la médiocrité, des béni-oui-oui qui travaille sur ordre.
-Etc.

Pour conclure, je prie DIEU que Son Excellence Monsieur le Président du Faso et Son Excellence Monsieur le Premier Ministre soient bien inspirés et qu’ils prennent des mesures fortes, justes et équitables. Elles seront nécessairement impopulaires à très court termes parce que Blaise est parti, mais son système, comme vous le voyez, « est bien en place », prêt à défendre l’indéfendable, « réfléchissant toujours par le ventre ». La tâche est immense, gargantuesque mais possible.
Vous aurez l’appui des hommes justes (ils ne sont pas nombreux) dont les prières ont permis à ce pays béni par DIEU de ne pas sombrer dans le chaos.

DIEU VOUS BENISSE !!!

Pamoussa Joanny KABORE

Ancien Contrôleur Financier

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