Dans le contexte politique actuel de la Côte d’Ivoire, le choix de Henriette Diabaté (82 ans), ce dimanche 10 septembre 2017, comme nouvelle présidente du Rassemblement des Républicains (RDR), est assurément une option judicieuse, à plusieurs titres,  pour le président Alassane Ouattara et son parti, le RDR, appelé à survivre à la présidence de son fondateur et aux vicissitudes conjoncturelles du Rassemblement des Houphouëtistes  pour la démocratie et  la paix (RHDP).

L’option, adoubée par les congressistes des 9 et 10 septembre, du président Alassane Ouattara, de faire de la vétérane Henriette Diabaté, la nouvelle présidente du Rassemblement des Républicains (RDR) est certes  une surprise pour beaucoup d’observateurs qui voyaient Ouattara lui-même occuper le poste.

Mais, cela est surtout une décision judicieuse non seulement pour le chef de l’Etat mais aussi pour son parti le RDR,  dans un contexte de tensions et clivages internes et de dégradation de l’alliance historique scellée avec le PDCI-RDA doublée d’une crise sécuritaire inquiétante, qui a amené les autorités à pointer le doigt accusateur sur des pro-Gbagbo exilés.

3 choix qui s’offraient à ADO partant

Si ADO veut bien quitter les affaires  avant que les affaires ne le quittent, le contexte de clivages internes au RDR avant le présent congrès et même de mise à l’écart de cadre important comme le président de l’Assemblée nationale Guillaume Soro n’était pas du tout indiqué.

Dans un contexte, il y avait pour lui trois options pour Alassane Ouattara. Choisir un camp pour que ce camp l’emporte sur l’autre ou les autres. Prendre les commandes lui-même pour obliger les uns et les autres à rentrer dans les rangs ; quitte à renvoyer aux calendes grecques sa volonté affichée depuis plusieurs mois de quitter les affaires. Et enfin trouver quelqu’un de neutre  qui peut  de par son poids travailler à rassembler les rangs du parti sans calculs politiques  ou arrière-pensées.

La femme de la situation

C’est donc cette dernière option, visiblement la meilleure, qu’il a su faire en portant son choix sur Henriette Diabaté, une figure emblématique du parti que ses fonctions de responsable d’institution républicaine-elle était depuis le 18 mai 2011 Grande chancelière des ordres ivoiriens- avaient obligé à se mettre en retrait des questions partisanes. L’on était même arrivé à l’oublier, elle qui a su par le passé, même aux moments les plus critiques de la Côte d’Ivoire, défendre les intérêts du RDR et de la Côte d’Ivoire en sa qualité notamment de battante secrétaire générale du RDR.

Militante et responsable de longue date du parti présidentiel, ancien ministre de la culture et de la Francophonie, ancien ministre d’Etat, garde des Sceaux, Henriette Diabaté a l’étoffe nécessaire pour habiter valablement la fonction du président du RDR et travailler véritablement à sa cohésion dans ce  contexte interne difficile. Elle était, comme dirait l’autre, la femme de la situation.

Poids et neutralité, ses atouts

Neutralité supposée et son poids dans le parti devraient être des atouts certains d’Henriette Diabaté dans  cette délicate mission. Elle a aussi cette chance de bénéficier du soutien du fondateur du parti Ouattara  qui a eu cette clairvoyance de la choisir. En principe, les différentes factions du RDR ne devraient pas trouver à redire sur ce choix de Henriette Diabaté. C’est à se demander si le président Ouattara l’avait préparée à cela.

On le sait, il n’était pas seulement question de l’avenir du Rassemblement des républicains à ce troisième congrès ordinaire. Il s’y jouait également l’avenir du RHDP, en proie à des vicissitudes  depuis plusieurs mois déjà et beaucoup s’interrogeaient  et s’interrogent encore sur cette alliance gagnante qui a permis au RDR et à son alliée PDCI-RDA de remporter la présentielle de 2010 et la réélection d’Alassane Ouattara en 2015.

A priori, à l’analyse des discours à ce congrès, des deux principaux acteurs de l’appel de Daoukro, en l’occurrence les président Henri Konan Bédié et Alassane Ouattara, l’on semble s’acheminer vers un autre ticket commun RHDP en 2020 avec probablement un leader du PDCI-RDA comme porte-étendard à cette présidentielle à venir.

Amadou Gon Coulibaly, un bon serviteur aussi de Ouattara et de l’Etat

Si cette décision  du RDR est sincère, le parti n’aura apparemment pas de difficultés à respecter ses engagements avec Henriette Diabaté. Puisque jusque-là elle n’a montré aucune velléité de  succéder à ADO, ses fonctions de Grande chancelières de la République  le lui interdisaient. Son premier vice-président, Amadou Gon Coulibaly, semble lui aussi un fidèle et bon serviteur du président Ouattara et de l’Etat de Côte d’Ivoire et il ne lui viendra apparemment  pas à l’esprit de vouloir à un moment donné constituer un obstacle à l’application des accords de Daoukro qui fait de Henri Konan Bédié ou d’un de ses fidèle, le potentiel candidat du RHDP à la présidentielle de 2020.

A le voir, Amadou Gon Coulibaly peut parfaitement attendre le prochain tour du RDR au RHDP pour partir à la conquête du fauteuil présidentiel.

Henriette Diabaté, un couteau à double tranchant aux mains du RDR

Nous sommes bien en politique et rien n’est gagné d’avance. Il faut toujours prévoir un plan B au cas où. Et si le projet de ticket RDR-PDCI ou de ticket RHDP en 2020 devrait, pour X ou Y raison, se défaire entre-temps ; Henriette Diabaté pourrait se révéler aussi un excellent  candidat pour le RDR, au vu de son parcours et du soutien qu’elle pourrait bénéficier du président sortant.

Même dans la perspective où le PDCI-RDA se déciderait, comme cela se dit depuis quelque temps, de jeter son champion historique, son baobab, Henri Konan Bédié, dans le jeu. Elle est femme battante de la même génération que Bédié et elle n’a jamais eu à gérer le pouvoir suprême.

Ce sont là de réels atouts pour une éventuelle candidature de Dame Diabaté à la présidentielle de 2020 au cas où le ticket commun RHDP ne fonctionnerait pas. En cela, Henriette Diabaté est une sorte de couteau à double tranchant, un joker politique aux mains d’Alassane Ouattara et du RDR, en ce moment crucial de la Côte d’Ivoire

Philippe Martin

Burkina Demain

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