Distingué en mi-octobre 2015 à Paris pour la recherche intitulée « Rain Cell Africa, le Professeur François Zougmoré a présenté ce jeudi 11 février 2016 à Ouagadougou son trophée à la communauté scientifique et à son ministre de tutelle, Pr Filiga Michel Sawadogo. C’était au cours d’une cérémonie officielle au cours de laquelle des hommages ont été rendus aux différents acteurs de cette distinction exceptionnelle.
Pour la première fois, le trophée de la recherche énergie-environnement –climat échoit à un chercheur de l’hémisphère sud. Et c’est le Pr François Zougmoré de l’Université Ouaga I Joseph Ki-Zerbo que l’honneur est revenu en octobre 2015 de recevoir le prestigieux trophée. Une distinction qui honore toute l’université, toute la communauté de chercheurs du pays et qui méritait d’être célébrée d’une certaine façon, surtout que le lauréat a été retenu au terme d’une compétition qui enregistré la participation de 1 500 œuvres. C’est désormais chose faite la présentation ce Jeudi 11 février du trophée au cours d’une cérémonie présidée par le ministre de la recherche scientifique et de l’innovation.
Dans son intervention le ministre Filiga Michel Sawadogo a félicité le lauréat, ses collaborateurs. C’est, a-t-il dit, une fierté pour la communauté de chercheurs burkinabè. Et de souhaiter que cela fasse tache d’huile, exhortant les chercheurs à inscrire leurs actions dans la recherche aux solutions aux préoccupations de développement du pays. Ce trophée, dira pour sa part le président de l’université Ouaga I Joseph Ki-Zerbo, est la preuve que son institution compte des chercheurs qui trouvent. Surtout que la présente distinction intervient après une autre, notamment celle du Professeur Philippe, honoré également en 2015 découverte de ″Rusilla sankarae″. Rendant hommages à tous ses collaborateurs, le Pr Zougmoré a décrit tout le cheminement de la recherche qui a abouti à cette reconnaissance internationale. Le trophée attribué à Zougmoré, est destiné, faut-il le rappeler, à récompenser des laboratoires dont les recherches portent sur :
-le développement de technologies innovantes dans les secteurs de l’eau, de l’air, des déchets, de l’énergie, du bruit ;
-les impacts économiques, juridiques, climatologiques, sanitaires ou sociaux des options énergétiques ou environnementales prises ou à prendre par les différents acteurs économiques
La recherche du Pr Zougmoré en question
Projet de mise en place d’un système de suivi/estimation des pluies en s’appuyant sur les réseaux de téléphonie mobile », la recherche du Professeur François Zougmoré intitulé ‘’Rain Cell Africa’’ pourrait bouleverser la gestion de la ressource en eau dans les pays africains, très affectés par la variabilité des précipitations. Un partenariat entre des scientifiques de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) du laboratoire d’étude des transferts en hydrologie et environnement de Grenoble (LTHE), de Geoscience environnement Toulouse (GET) et du laboratoire de matériaux et environnement (Lame) de l’université de Ouagadougou, au Burkina Paso, a permis de développer cet outil économique pour enregistrer les précipitations. Les données des réseaux météorologiques locaux se dégradent par manque de suivi et de moyens économiques. «Les radars météorologiques sont trop onéreux pour ces pays, et les satellites ne fournissent pas encore la pluie avec la précision spatiale et temporelle nécessaire. L’idée était donc d’utiliser le réseau de téléphonie mobile pour quantifier les précipitations. En effet, la pluie atténue les signaux hertziens. Il est donc possible de quantifier l’eau tombée en fonction du signal qui se propage entre deux antennes, d’autant que ces données sont enregistrées par les opérateurs téléphoniques pour la maintenance des antennes», explique l’innovateur. Et en utilisant des infrastructures existantes, Rain Cell offre un maillage plus complet du territoire sans nécessiter d’investissements.
Au Burkina Paso, l’opérateur téléphonique Telecel Faso détient 600 pylônes. Cela signifie 600 points de mesure potentiels, soit 600 pluviographes virtuels. Le procédé a été validé sur une zone test équipée de pluviographes et d’un radar météorologique. Il détecte plus de 90 % des événements pluvieux. Cet outil pourrait, par exemple, aider à mieux évaluer localement les risques de sécheresse. En recevant les données en temps réel, il serait aussi possible d’élaborer des cartes de risque d’inondations ou d’alimenter des modèles hydrologiques.
L’idée ingénieuse de Rain Cell Africa
Les scientifiques du projet Rain Cell Africa ont eu cette idée ingénieuse de se servir des pylônes de téléphonie mobile comme points de mesure des pluies. En Afrique, on estime à 180 000 le nombre de pylônes et donc de points de mesure potentiels, en particulier dans les zones urbaines plus équipées. Encore faut-il convaincre un opérateur de téléphonie mobile de fournir ses données de maintenance. Pour l’instant, un acteur local, Telecel Faso, a participé à la première phase du projet, mais les chercheurs sont aussi en discussion avec Orange pour une expérimentation au Mali. La deuxième phase vise à développer d’ici deux à trois ans des outils opérationnels (cartes des précipitations en temps réel) en collaboration avec les services nationaux de météorologie au Burkina Faso et au Mali. Lors du colloque international organisé en avril dernier à Ouagadougou, de nombreux services météorologiques se sont montrés intéressés par la technologie de même que le Programme des Nations unies pour le développement.
Martin Philippe
BURKINADEMAIN.COM