Le Premier ministre français est à Ouagadougou. Il est arrivé ce samedi dans la capitale en provenance de Bamako. Comme à Bamako avec les autorités maliennes, la lutte contre le terrorisme figurera au menu des échanges avec les dirigeants burkinabè lors de ce séjour ouagalais de Manuel Valls.
Sa visite avait été annoncée après les attaques terroristes du 15 janvier 2016 à Ouagadougou. Attaques ayant fait plus d’une trentaine de morts et dans lesquelles avaient péri trois Français. Mais, cette annonce de la venue au Burkina de Manuel Valls avait été vite démentie et ladite visite renvoyée à une date ultérieure.
Finalement, c’est dans la matinée de ce samedi 20 février que l’avion transportant le chef du gouvernement de la France a foulé le tarmac de l’aéroport international de Ouagadougou. A sa descente de l’appareil, Valls est accueilli par Paul Kaba Thièba, son homologue burkinabè. Le tapis rouge a même été déroulé au Premier ministre socialiste. Mais, au-delà de ces salamalecs diplomatiques, les choses ne sont pas aussi roses entre Paris et Ouaga, à en juger par les couacs communicationnels qui ont émaillé la gestion des attaques du 15 janvier 2016. Certains ont parlé de «guerre de communication».
Rappel des faits
Au fait, que s’est-il passé ? Nous sommes au 19 janvier 2016. Alors que la situation était encore confuse sur le nombre exact des assaillants de la tragédie, voilà qu’au détour d’une question de journaliste français, Valls annonce qu’il y avait six agresseurs dont trois sont tués et les trois autres en fuite. La presse française n’en demandait pas mieux. Mais, le problème, c’est qu’un autre chiffre était avancé à Ouagadougou par les autorités sécuritaires qui ont parlé de trois assaillants. Alors qui dit vrai et surtout qui était plus habilité à donner le bilan. A Ouaga, la communication de Valls est assimilée à de l’ingérence dans les affaires intérieures du Burkina, même si des forces françaises ont participé à l’assaut contre les terroristes. Le couac est grave. Mais, il n’y a pas que ça. L’on reproche également au Premier ministre de François Hollande d’avoir tenu des propos exclusifs dans son mot à l’endroit uniquement des familles de victimes françaises des attaques alors que les victimes des autres nationalités méritaient aussi sa compassion. En plus de Valls, il y a également l’ambassadeur de France à Ouaga, Gilles Thibault qui a été sur la sellette pour avoir contredit lui-aussi Simon Compaoré, ministre d’Etat en charge de la sécurité, sur l’identité des assaillants. L’ambassadeur Thibault avait parlé de femme qui figurait parmi les assaillants, alors que Simon Compaoré n’en avait pas fait cas. Avec toutes ces bourdes commises du côté français, il était visiblement difficile pour Valls d’effectuer dans la foulée des attaques sa visite au Burkina, vu que ces couacs avaient suscité de mécontentement dans beaucoup de milieux.
Conjuguer les esprits et les stratégies face au terrorisme
Si Manuel Valls est finalement là aujourd’hui, certainement que l’eau a coulé sous les ponts. Mais, il reste que c’est l’occasion pour la partie française et burkinabè de dissiper officiellement les couacs survenus dans la gestion des attaques du 15 janvier 2016. C’est dans l’intérêt de chaque partie : la guerre contre le terrorisme ne saurait se gagner dans la division des partenaires. C’est pourquoi, l’idée d’un départ des forces étrangères, notamment françaises, n’est pas forcément la solution. Si solution il devrait y avoir à la menace terroriste, il résiderait dans la conjugaison des esprits et des moyens. En cela, Paris et Ouaga avaient intérêt à passer très vite l’éponge sur les malentendus et à se concentrer sur le renforcement des stratégies communes de lutte contre le terrorisme.
Martin Philippe
BURKINADEMAIN.COM