Après 11 ans d’instruction, la justice française sollicite le renvoi de trois anciens ministres français devant la Cour de justice de la République. Il s’agit de Dominique de Villepin, alors ministre de l’intérieur, Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense et Michel Barnier, ministre des affaires étrangères. Ils sont mis en cause pour avoir entravé l’enquête sur ce bombardement qui avait coûté la vie à 9 soldats français et un civil américain.
La juge Sabine Kheris reproche aux trois anciens ministres de l’Intérieur, des Affaires étrangères, et de la Défense) d’avoir tout fait pour empêcher l’arrestation des deux pilotes biélorusses, auteurs du bombardement du lycée Descartes le 6 novembre 2004. Pourtant, ces pilotes avaient été repérés, filmés, identifiés, surveillés dès la descente de l’avion .
Dix jours après le bombardement, ils sont arrêtés au Togo. Le ministre de l’Intérieur togolais François Boko « les retenaient pour permettre leur éventuelle arrestation » par Paris. A ce moment-là, la France a l’occasion de mettre la main sur les auteurs d’assassinats contre ses ressortissants, mais elle ne fait rien. Les pilotes sont remis en liberté et ne sont jamais réapparus depuis, en dépit des mandats d’arrêt dont ils font l’objet. Pour la juge : « la décision ne rien faire […] a été prise à l’identique par le ministère de l’Intérieur, de la Défense, et des Affaires étrangères ce qui permet de penser à l’existence d’une concertation à un haut niveau de l’Etat. »
Les trois ministres risquent « 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende », selon la juge pour avoir « soustrait aux recherches et à l’arrestation » des individus ayant commis un crime.
Dans son ordonnance du 2 février 2016, la juge rejette les arguments avancés par les ministres. Michèle Alliot-Marie, titulaire du portefeuille de la Défense, soutient qu’il n’y avait « pas de base légale puisque pas de mandats d’arrêt internationaux » pour appréhender les pilotes.
Dominique de Villepin, alors ministre de l’Intérieur, assure lui qu’il n’a « pas été mis au courant » de cette affaire, ce que contredisent les déclarations de l’attaché de Défense au Togo. L’ancien ministre des Affaires étrangères, Michel Barnier, est lui mis en cause pour avoir donné l’ordre de remettre aux autorités russes les 15 techniciens de nationalité russe, biélorusse et ukrainienne qui avaient été interpellés à Abidjan dans les heures suivant le bombardement.
Le général français Henri Poncet, commandant de la force Licorne en Côte d’Ivoire, reconnait pourtant qu’il aurait été « intéressant de les interroger ».
Anderson KONE
BURKINADEMAIN.COM