S’il y a une personnalité burkinabè qui a raté l’occasion ou n’a pas voulu saisir l’occasion de ces municipales du 22 mai pour exprimer son civisme ; c’est bien Paul Kaba Thièba, lui qui était déjà absent des élections présidentielle et législatives du 29 novembre 2015. Le Premier ministre a préféré tout simplement s’envoler, à la veille du scrutin, pour Taipeh, pour, dit-on, renforcer la coopération taiwano-burkinabè ; alors qu’il avait la latitude de surseoir, ne serait-ce que le temps de ces élections, à ce déplacement de routine pour un locataire de la Primature.
Comme à chaque scrutin, bon nombre de personnalités du pays, que ce soit du côté du pouvoir ou de l’opposition, ont accompli leur devoir civique ce dimanche en votant dans le cadre des municipales du 22 mai 2016. Ainsi le président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré, et le Chef de file de l’opposition politique, Zéphirin Diabré, ont voté à Ouagadougou ; pendant que le président de l’Assemblée nationale, Salif Diallo en faisait autant dans son fief de Ouahigouya.
Mais, un haut personnage de l’Etat, en l’occurrence, le Premier ministre, Paul Kaba Thièba, himself, aura brillé par son absence. Le chef du gouvernement burkinabè a en effet choisi cette période cruciale des élections municipales pour répondre favorablement à une invitation de visite à Taiwan. Il s’est ainsi envolé le 16 mai dernier, à quelques jours du scrutin, pour Taipeh, pour, dit-on, renforcer la coopération taiwano-burkinabè ; alors qu’il avait la latitude de surseoir, ne serait-ce que le temps de ces élections, ce déplacement de routine pour un locataire de la Primature. En effet, rares sont les Premier ministres sous les deux régimes précédents qui ne se sont pas rendus en visite officielle à Taiwan. Et Thièba pouvait faire sa visite à tout moment mais pas pendant ces municipales qui semblent, si l’on s’en tient aux tendances générales, avoir battu le record de faible taux de participation. Si le Premier ministre était resté, il aurait pu certainement contribuer à améliorer ce taux à travers son vote et les votes de ceux qui suivraient son exemple.
Au-delà du problème circonstanciel
Mieux, au-delà de ce problème circonstanciel de faible de taux de participation au scrutin, Paul Kaba avait là une occasion de se rattraper, vu qu’il n’a visiblement pas joué un rôle lors de la présidentielle et des législatives du 29 novembre 2015. Il vivait à l’étranger, au Sénégal, et les Burkinabè de l’étranger dont lui, n’ont pas été autorisés à voter. Maintenant qu’il a été par la suite l’un des grands bénéficiaires providentiels de la victoire de Roch March Christian Kaboré à la présidentielle, et vit au pays, Paul Kaba devait quand même se servir de cette opportunité qui lui est offerte de voter en tant que Burkinabè résident.
Pour rien au monde, il ne devrait la rater, cette occasion de voter. Beaucoup de compatriotes à l’étranger se battent depuis des décennies pour avoir le droit de vote et lui préfère s’en passer, pour une fois qu’il a l’occasion, pour une histoire de visite.
Cette attitude du Premier Thièba est donc incompréhensible et ne résiste à aucun raisonnement sérieux, si tant est qu’il est détenteur d’une carte d’électeur. A quoi cela sert d’avoir une carte d’électeur et choisir de voyager à quelques jours des votes tout en sachant pertinemment que l’on ne sera pas de retour avant le jour des élections ? Ce n’est ni moins, ni plus qu’un boycott du scrutin par celui qui est censé donné le bon exemple en matière de civisme électoral. L’autre hypothèse, c’est que le Premier ministre n’est pas détenteur d’une carte d’électeur. Dans ce cas, son déplacement pendant ces élections s’apparente à une fuite qui ne saurait le dédouaner. Car, cela traduirait, quelque part, un désintérêt, voir un mépris de la chose électorale, politique. Ce qui serait extrêmement grave parce que l’on ne peut plus en ce moment trouver à redire sur la désaffection du Burkinabè lambda par rapport à la chose politique. Comme, on aime à le dire, ‘’le poisson pourrit par la tête’’.
Enfin, si le Premier ministre Thiéba voudrait par ce voyage se montrer au-dessus de la mêlée de la chose politique ; c’était également mal parti. A partir du moment il est le Premier ministre d’un pouvoir politique, sa marge de manœuvre est limitée. D’un moment à l’autre, il sera plus ou moins obligé de mettre la main dans la tambouille, si tant est qu’il tient à son fauteuil de Premier ministre. Avant lui, beaucoup de Premier ministres avaient tenté au début de leurs fonctions de résister à la férule des politiques et de jouer la carte de la neutralité mais leur résistance a fait long feu. La plupart d’entre eux ont effet fini par se revêtir de manteaux de politiques engagés. Bref, nous ne disons pas que tout devrait se résumer ces temps-ci aux municipales ; mais ce déplacement de Paul Kaba Thièba à Taiwan n’est pas une bonne option.
En vérité,
Burkina Demain
