Décidément, ces temps-ci, les relations ne sont pas au beau-fixe entre les institutions de Brettons Woods et les pays lusophones d’Afrique. Après le Mozambique en Afrique australe dont la coopération avec le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale a été gelée en avril dernier ; c’est à présent le tour de la Guinée-Bissau en Afrique de l’Ouest d’être abandonnée par le FMI et d’autres bailleurs. En cause, la mauvaise gestion des finances publiques à Bissau et à Maputo.
Pour le Fonds monétaire international (FMI), les autorités Bissau -Guinéennes ne gèrent pas comme il se doit les finances publiques du pays. Conséquence : le FMI, l’un principaux partenaires financiers, a décidé de suspendre son appui à Bissau.
A la base de cette décision-sanction du FMI, le décaissement début mai de 35,2 milliards de francs CFA environ (63 millions d’euros) par l’ancien gouvernement bissau-guinéen. Ces fonds décaissés des comptes de l’Etat sans tenir compte de l’impact sur l’économie nationale et des engagements avec le FMI aurait servi à l’achat de l’ensemble des dettes du secteur privé.
Mais, le pire pour Bissau, c’est que d’autres partenaires financiers de poids comme la Banque africaine de développement (BAD) et l’Union européenne (UE) ont décidé aussi de s’aligner sur la mesure du FMI.
Du coup, le pays, déjà l’un des plus pauvres au monde, se retrouve dans une situation financière chaotique. De quoi causer de sérieux soucis au gouvernement du Premier ministre Baciro Djá. Son ministre de l’économie et des finances, Henrique Horta dos Santos, annonce déjà, le pincement au cœur, un déficit budgétaire abyssal de 22,4 milliards de FCFA. Bref, à Bissau, après l’interminable crise politique, c’est le tour d’une crise économique et financière sans précédent de s’installer.
Le précédent mozambicain
En Afrique australe, le Mozambique, un autre pays lusophone, est sous le coup de sanctions de ce genre. Une série de sanctions déclenchée mi-avril dernier par le Fonds monétaire international, suivi plus tard par la Banque mondiale. A l’origine de ces sanctions des institutions de Brettons Woods, l’aveu du Mozambique sur sa dette cachée de plus d’un milliard de dollars. Un coup dur pour le pays de Samoura Machel, habitué depuis longtemps à des investissements massifs des bailleurs de fonds internationaux.
En effet, le Mozambique s’est classé en 2013 au second rang des pays africains récipiendaires d’Investissements directs étrangers (IDE), derrière l’Afrique du Sud. Cette année-là, les IDE en direction de Maputo ont atteint un niveau record de près de 6 milliards de dollars américains, soit plus de 40 % du PIB.
Une Honte pour le Mozambique
Grâce à ces investissements massifs des bailleurs de fonds internationaux, le Mozambique était parvenu, depuis la fin de la guerre civile, à la stabilisation macro-économique, avec une croissance forte autour de 7% par an depuis 1994.
Au regard de ces performances économiques exceptionnelles passées, la situation actuelle du Mozambique vis-à-vis des institutions de Brettons Woods et des autres bailleurs est une véritable honte pour le pays. Et dire que son ex-président, Joaquim Alberto Chissano, a été en 2007 le premier lauréat du Prix Mo Ibrahim pour la bonne gouvernance.
Au-delà de son propre pays, Chissano peut avoir aujourd’hui une bonne raison de regretter la situation en Guinée-Bissau où il avait été envoyé spécial des Nations-Unies en 2005.
La parade chinoise suffira-t-elle pour Maputo ?
Face à la situation, les dirigeants mozambicains actuels étaient comme désemparés. Le dos au mur, le président Filipe Nyusi a dû, en mai dernier, se rendre en Chine pour solliciter de nouveaux prêts financiers auprès du pays de l’empire du milieu.
Déjà en 2015, Maputo avait obtenu du géant asiatique, à l’issue du Sommet Chine-Afrique en Afrique du Sud, une aide de 5 milliards de dollars pour financer divers projets d’infrastructures.
Reste maintenant à savoir si la parade chinoise suffira à sortir le Mozambique du gouffre financier dans lequel il s’est empêtré, avec une dette publique avoisinant aujourd’hui les 70 % de son Produit intérieur brut (PIB).
Grégoire B. Bazié
Burkina Demain