Le cinquième sommet du Traité d’amitié et de coopération (TAC) ivoiro- burkinabè se tient ce vendredi 29 juillet 2016 à Yamoussoukro en présence des présidents Alassane Ouattara de Côte d’Ivoire et Roch Marc Christian Kaboré du Burkina Faso. Impossible au cours de cette rencontre de haut niveau, de ne pas aborder le volet énergie qui reste un axe central et névralgique de la coopération ivoiro-burkinabè.
L’on avait souvent pensé que l’intégration, la coopération via le partage d’énergie était plus facile à réaliser que celle qui se faisait par les axes routiers, susceptible d’être entravée par des tracasseries policières. Mais, dans bien de cas dont celui entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso, l’on s’est rendu compte que l’intégration énergétique était bien plus compliquée à réaliser, surtout quand la question de l’auto- suffisance n’est pas réglée en amont. Ces propos proférés lors des récentes manifestations contre la Société ivoirienne d’électricité (CIE) sont illustrateurs de cet état de fait : «Ce n’est pas normal de payer si cher dans un pays qui exporte de l’électricité à ses voisins ».
Pour rappel, des abonnés de la CIE ont manifesté de manière violente, la semaine dernière, leur colère à cause d’une succession de factures élevées. Et très vite, certains ont commencé à s’attaquer à la question de la distribution de l’électricité produite en Côte d’Ivoire dans les pays voisins, alors que les Ivoiriens ont du mal à se la procurer à moindre coût.
La Côte d’Ivoire n’est pas le seul pays dans la situation
Ils ont peut-être raison d’exprimer leur mécontentement à la CIE, mais de là à voir d’un mauvais œil l’esprit de solidarité inter-Etat en matière d’énergie, il n’y a qu’un pas qu’ils ont vite fait de franchir. La Côte d’Ivoire étant engagée dans des processus d’intégration à divers niveaux (Conseil de l’entente, UEMOA, CEDEAO), elle a cette obligation de partager son électricité avec ses voisins, qui plus est, n’est pas cédée gratuitement.
La Côte d’Ivoire n’est pas le seul pays dans cette situation de devoir être solidaire énergétiquement envers les pays frères quand bien même il n’est pas autosuffisant. Les autres gros producteurs de la région que sont le Nigeria, le Ghana, la Guinée sont également obligés de vendre du courant aux pays voisins, bien que n’étant pas auto-suffisants.
Renforcer la coopération énergétique malgré les aléas du moment
Avec ce qui se dit, l’on imagine déjà l’embarras que pourraient éprouver les autorités ivoiriennes et burkinabè pour parler de renforcement de la coopération énergétique. La partie burkinabè serait par exemple enchantée d’entendre que la partie ivoirienne décidait de dépasser la barre des 70-80 mégawatts fournis à l’heure actuelle dans le cadre de l’interconnexion. Mais, vu le contexte actuel, difficile d’y rêver.
Mais, quoi qu’il en soit, le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire ont cette obligation devant l’histoire d’aller de l’avant dans leur coopération sur le plan énergétique.
Dans cette perspective, l’autre projet qui devrait retenir l’attention soutenue lors de ce 5e TAC, c’est la construction d’un pipeline sur la ligne Bouaké –Bobo. La réalisation de ce projet participera de la réalisation de l’ambition du président Kaboré d’assurer la disponibilité permanente des hydrocarbures sur toute l’étendue du territoire national.
Une interconnexion électrique vieille de 15 ans
L’interconnexion électrique est un élément central de la coopération énergétique entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso. L’interconnexion électrique entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso est officiellement entrée en service en avril 2001 avec Bobo comme premier centre bénéficiaire. Ouagadougou sera connectée au réseau le 31 décembre 2009.
Dans le contrat initial entre la Société nationale d’électricité du Burkina (SONABEL) et la Compagnie ivoirienne d’électricité (CIE), la Côte d’Ivoire s’était engagée à fournir au Burkina 400 GWH/an sur la base de 8000 h de la disponibilité de la ligne. Ce qui correspondait à une puissance garantie de 50 MW». En pratique, la Côte d’ivoire n’avait pas toujours été en mesure de fournir les 50 MW, surtout en 2011.
Mais, lors de la visite du Premier ministre Daniel Kablan Duncun à Ouagadougou en 2014, celui-ci s’était engagé à augmenter d’au moins 20 MW la puissance fournie au Burkina. Une promesse qui a été par la suite problématique à mettre en œuvre, surtout suite à l’insurrection populaire d’octobre 2014. Les autorités de la Transition n’ayant pas eu de très bonnes relations avec les autorités ivoiriennes, la coopération énergétique s’était aussi détériorée. D’où les délestages que le Burkina a connus en 2015. Et ces présentes retrouvailles dans le cadre du 5e TAC devraient permettre d’en sortir définitivement et d’impulser un nouveau dynamisme à la coopération énergétique, en dépit des aléas conjoncturels.
Grégoire B. Bazié
Burkina Demain