Une crise sans précédent secoue la Centrale d’Achat des Médicaments Essentiels Génériques (CAMEG) et le pire a été évité le jeudi 8 septembre 2016 lorsque des dizaines d’éléments de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS) ont été déployés au niveau du siège social de l’association en vue de « sécuriser » l’installation d’un nouveau directeur général.
Les agents du siège de la CAMEG se sont en effet élevés contre ladite installation et il s’en est fallu de peu que la police n’ait recours à la force face aux travailleurs mobilisés.
Dans cette affaire, un différend oppose le Ministère de la Santé d’une part et d’autre part le Président du Conseil d’Administration, Dr Bocar Kouyaté et l’actuel Directeur General, Dr Jean Chrysostome Kadeba. Le tribunal administratif de Ouagadougou avait tranché en faveur des seconds. La justice avait même prononcé un sursis à exécution de la décision portant remplacement des administrateurs.
Une autre demande a été introduite devant le Tribunal administratif le jeudi 8 septembre 2016 aux fins d’un sursis à exécution du récépissé de déclaration d’existence de l’association signé sous le numéro : N°00000000901 et délivré par le ministère de l’Administration territoriale de la décentralisation et de la sécurité intérieur (MATDSI), le 24 août dernier, portant création d’une entité dénommée CAMEG.
Le tribunal a là aussi accédé à la requête et ordonné le sursis à exécution dudit récépissé.
Il est alors difficile de ne pas conclure, vue la teneur de ces deux décisions de justice, que l’acte de déploiement de la CRS était illégal et inopportun surtout dans un contexte où les membres du dernier gouvernement de Blaise Compaoré ont été convoqués pour avoir entériné la réquisition des FDS qui visait à barricader l’assemblée nationale le 30 octobre 2014.
Pour couronner le tout, ce mardi 13 septembre, l’affaire CAMEG s’est déportée du Tribunal administratif au Tribunal de Grande Instance (TGI) de Ouagadougou. Le TGI a constaté qu’il y a des troubles manifestement illicites à l’encontre de la CAMEG, orchestrés par le PCA et le directeur général nommés par le ministre de la santé. La décision de justice dit explicitement que ceux-ci ne doivent plus poser des actes sous peine d’être poursuivis pour inexécution de décision de justice.
L’Ordre des pharmaciens du Burkina avait tiré la sonnette d’alarme car le bras de fer entre le ministre de la Santé et le Conseil d’administration de la CAMEG pourrait compromettre sérieusement les politiques sanitaires publiques. La CAMEG joue à cet effet un rôle central pour la mise en œuvre de la politique sanitaire dans la mesure où elle assure l’essentiel de l’approvisionnement du Burkina Faso en produits pharmaceutiques.
Les tensions de stocks se faisant déjà sentir, quel sort sera réservé à tous ces malades sous traitements divers, si le médicament venait à manquer?
Il est utile par exemple de signaler que la CAMEG fourni la plupart des médicaments ARV pour le traitement du VIH et des consommables pour la dialyse. En outre, une rupture dans l’approvisionnement des formations sanitaires au moment où le Gouvernement met en œuvre la gratuité des soins pour les enfants et les femmes enceintes pourrait avoir des conséquences incalculables.
La CAMEG représente également un exemple de réussite en Afrique qui inspire beaucoup de pays. Les partenaires techniques et financiers de la CAMEG s’inquiètent eux-aussi des répercussions de cette crise sur les programmes conjoints en cours et ceux qui sont en train d’être négociés.
En tout état de cause, le Balai Citoyen a pris la mesure de la situation et estime que la crise en cours qui cristallise les tensions autour de la CAMEG a été montée de toutes pièces par une autorité administrative illégitime et intrusive telle que l’ont concluent les différentes décisions de justice.
Nous invitons le gouvernement à agir instamment dans le strict cadre de la loi afin que la CAMEG puisse continuer à jouer sereinement son rôle d’approvisionnement en médicaments essentiels au profit de nos populations en vue d’assurer un accès pour tous aux soins et traitements de qualité au Burkina Faso.
La meilleure voie pour apporter une solution durable de gestion démocratique à la Centrale, c’est l’adoption des nouveaux textes régissant l’organisation et le fonctionnement de la CAMEG dont la relecture a été réalisée depuis bientôt un an à la satisfaction de toutes les parties.
En outre quel exemple veulent donner les autorités actuelles à travers le ministère de la santé qui ne fait preuve d’aucune retenue pour interpréter de façon tendancieuse les décisions de justice ? De tels actes d’incivisme au sommet de l’Etat font le lit de tous les incivismes. Les agissements au niveau du ministère de la santé démontrent clairement l’intention de contrôler les ressources d’une structure d’utilité publique à des fins inavouées. Cet état de fait est inacceptable dans le Burkina Faso post insurrectionnel et sera combattu par tous les patriotes soucieux de la construction d’un véritable état de droit démocratique.
« Notre Nombre est notre force. Ensemble, on n’est jamais seul »
La patrie ou la mort, nous vaincrons !
Fait à Ouagadougou le 14 septembre 2016
Pour le Balai Citoyen, la Coordination Nationale