Issiaka Kaboré est le directeur des études du lycée Wend Manegda, sis à Ouaga 2000. M. Ouédraogo est également coach en administration scolaire et académique. Il aborde dans la présente interview la rentrée scolaire 2016-2017 et se prononce sur des questions brûlantes du monde de l’éducation au Burkina dont l’incivisme.
Burkina Demain : Comment se passe la préparation de la rentrée scolaire à votre niveau?
Issiaka Kaboré : Tout se déroule bien. Nous nous préparons minutieusement et avec professionnalisme. Dans un mouvement d’ensemble, tout se passe dans les règles de l’art. Mieux, d’une manière orchestrale et harmonieuse.
Sous quel signe placez- vous cette année scolaire?
L’année année scolaire est placée sous le signe du management de la qualité: Discipline, rigueur, innovation ; mais aussi sous le signe de l’anticipation, du professionnalisme.
Concernant l’éducation, l’on a beaucoup jasé l’année dernière sur la question de l’incivisme avec par exemple des élèves de l’Est qui ont osé brûler le drapeau national et s’attaquer à leurs enseignants. Quelles sont, selon vous, les causes de ce phénomène ?
La problématique de l’incivisme est inhérente à plusieurs facteurs. C’est un fait social qui gangrène notre système éducatif. Il y existe aujourd’hui une culture anti-école avec son cortège de violence, de consommation d’alcool, de drogue, de sexualité précoce, de l’usage d’un langage pervers, de revendications insensées, de bras-de-fer permanent. Avouons aussi que l’Etat est en partie responsable de cette odieuse réalité. L’Etat a perdu son autorité. Et, comme le dit l’adage, le poisson pourrit par la tête. Il faut noter aussi la démission parentale, l’instrumentalisation des élèves, l’irresponsabilité de certains acteurs du système scolaire, l’amateurisme professionnel.
Avez- vous personnellement rencontré dans votre carrière des cas d’incivisme?
Oui.
Comment avez-vous réagi lorsque vous avez fait face à ces situations pour la première fois ?
J’ai gardé mon sang froid en favorisant un cadre de dialogue avec les élèves, notamment le bureau des élèves. Après des échanges, nous avons trouvé une solution idoine.
D’aucuns voient aussi dans l’incivisme scolaire une responsabilité des enseignants. Comprenez-vous cela ?
L’incivisme a une dimension multiforme et multidimensionnelle. Tous les acteurs sont coupables. Evitons de faire le procès des enseignants. Avouons que les enseignants abattent un grand travail avec des ressources limitées. En substance, les responsabilités sont partagées.
Quelles peuvent être les solutions à ce phénomène d’incivisme ?
Imposer la matière éducation civique et morale du primaire à la terminale; sensibiliser et conscientiser tous les acteurs du système scolaire; motiver le personnel administratif; renforcer les capacités des acteurs sur le civisme; imposer la rigueur ; créer des prix d’excellence; Bref, il faut un management de qualité avec son cortège d’innovation, d’anticipation, de formation, de professionnalisme, de rigueur, de motivation, de communication professionnelle, d’union sacrée, de cohésion sociale….
En milieu scolaire, il y a aussi la question des grossesses non désirées qui est devenue une préoccupation majeure?
C’est une odieuse réalité qui freine brutalement le parcours scolaire des jeunes filles. A qui la faute? C’est la société. Les jeunes filles sont laissées à elles-mêmes. Elles prennent des risques énormes. La conscientisation et la sensibilisation s’imposent.
En avez-vous été témoin dans votre carrière d’enseignant ?
Oui. Nous rencontrons malheureusement quelques cas.
Là aussi, certains n’hésitent souvent pas à pointer le doigt sur la responsabilité des enseignants dans la survenue des grossesses non désirées dans les établissements…
Ce n’est pas normal. Ce comportement est proscrit par les textes légaux du système scolaire et même puni par la loi.
Des pistes de solutions pour y remédier ?
Les solutions sont multiples. Nous pouvons citer entre autres: l’éducation de base, la sensibilisation et la conscientisation des jeunes filles et tous les acteurs du système scolaire. Cela peut se faire à travers des projections de films, de débats, de conférences mais aussi à travers l’imposition de l’éducation civique et morale dans les établissements.
Entretien réalisé par Martin Philippe
Burkina Demain