A l’issue de la rentrée solennelle des Cours et Tribunaux du Burkina Faso pour le compte de l’année judiciaire 2016-2017 qui s’est déroulée le lundi 03 octobre 2016, le président du Faso, Roch Marc Christian KABORE, par ailleurs garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire, s’est prêté aux questions des journalistes. Lisez plutôt.
Burkina Demain (BD): Excellence Monsieur le président du Faso, vous venez d’assister à la rentrée solennelle des Cours et Tribunaux du Burkina Faso pour le compte de l’année judiciaire 2016-2017. En tant que garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire, quel sentiment vous anime après cette cérémonie ?
Roch Marc Christian KABORE (RMCK): C’est un rituel d’organiser chaque année la rentrée judiciaire. C’est un plaisir pour moi d’y participer pour la première fois, en tant que président du Faso. Je voudrais non seulement saluer le thème qui a été choisi et qui porte sur la démocratie financière. Ce qui signifie la transparence dans les actions publiques, la redevabilité, la nécessité également pour les citoyens de s’intéresser à la gestion publique. Ce sont autant de questions qui rentrent dans le programme que j’ai promis de mettre en place au Burkina Faso. C’est un programme dans lequel j’invite l’ensemble des acteurs de la Fonction publique et de l’administration de façon générale au changement. Il faut que chacun sache que désormais les choses ont changé et que chacun sera redevable de ses pratiques au niveau de son administration. Les réformes qui sont mises en exergue sur la Cour des comptes sont des réformes qui sont déjà intégrées. Il s’agit de mettre la Cour des comptes du Burkina Faso aux normes de la sous-région et aux normes internationales. Nous nous sommes engagés dès le départ à mettre en œuvre le Pacte du renouveau de la justice. Nous avons déjà fait une œuvre utile en la matière en prenant l’ensemble des textes et en prenant l’ensemble des mesures financières concernant l’amélioration des conditions des juges. Je voudrais simplement vous rassurer que concernant la Cour des comptes ce sont des réformes qui aussi en cours. Le ministre en charge de la justice se fera fort de mettre en œuvre et proposer les réformes qui permettent d’assurer non seulement l’autonomie certainement financière de cette institution mais également les compétences nécessaires pour mener à bien les missions de contrôle. A ce niveau, il n’y a pas de confusion. Je souhaite une très bonne rentrée judicaire à tous les juges, à tous les magistrats et dire également que le peuple burkinabè les regarde quant à ce qu’ils puissent dire le droit quand cela est nécessaire.
BD: Garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire, est-ce la nouvelle casquette que vous avez trouvée pour pouvoir rester au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) après en avoir été expulsé ?
RMCK: Je ne suis même pas membre du CSM. Je suis garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire justement parce que je ne suis pas membre du CSM.
BD: Vous êtes garant de l’indépendance de la justice. Il y a justement des dossiers qui concernent les procès de l’insurrection populaire et du putsch manqué qui sont toujours en attente. Les familles des martyrs estiment que les procès tardent à venir. Les avocats des détenus estiment que leurs clients ont trop passé du temps en prison et que le politique s’ingère dans ces dossiers. Qu’avez-vous à répondre à ces différentes positions ?
RMCK: Depuis le pacte du renouveau de la justice, il y a une disjonction complète entre l’exécutif et le judiciaire. Cela signifie de façon très claire que toutes les questions sont dans les mains de la justice. Il faut que nous comprenions définitivement que nous ne sommes plus dans des Etats d’exception et que nous sommes dans un Etat de droit. Cela veut dire que nous devons respecter l’ensemble des procédures. Je puis vous assurer, en tant que président du Faso, je ne m’immisce pas dans ces questions parce que je considère qu’aujourd’hui le peuple burkinabè est en attente d’une justice sur ces différentes préoccupations que vous venez de poser. Nous ne pouvons qu’exhorter la justice à faire avec le maximum de célérité son travail pour que chacun soit puni à la hauteur de ses forfaits. Tout le reste, de mon point de vue, n’est que politique politicienne. En tant que président du Faso, je ne m’immisce pas dans ces questions. J’ai toujours demandé au corps de la justice de faire en sorte que nous puissions terminer ces procès le plus rapidement possible. Pour nous, cela est important, car plutôt ces dossiers seront jugés plus les Burkinabè regarderont vers l’avenir; plus on traine avec plus nous regardons dans le rétroviseur et nous n’avançons pas. Nous sommes tout à fait clair là-dessus.
B D: Vous avez tenu des propos à Dakar que les magistrats ont trouvé un peu équivoque. Le président de l’Assemblée nationale a tenu des propos disant qu’on ne peut pas quitter la dictature des ânes pour aller dans la dictature de Roch. Est-ce qu’à la faveur de la réforme constitutionnelle vous allez revenir sur l’indépendance de la justice et réintégrer le CSM ?
RMCK: Je n’ai jamais eu des propos équivoques en la matière. J’ai dit simplement que depuis la réforme le président du Faso n’est plus membre du CSM et que de ce point de vue on ne peut pas dire que je m’immisce dans des nominations de juges ou dans des questions diverses qui les concernent. Concernant l’indépendance de la justice, il n’est plus possible de revenir là-dessus. C’est une option qui a été prise et de ce point de vue, nous sommes engagés à poursuivre justement la mise en œuvre complète du pacte du renouveau de la justice. Parlant de la Commission constitutionnelle, nous avons demandé à un certain nombre de personnes qui représentent aussi bien les partis politiques, la société civile, en tout cas toutes les composantes de notre société d’y réfléchir. Il ne m’appartient pas de donner des orientations et des instructions en la matière. J’estime que ceux que nous avons choisi sont bien instruits et bien dotés pour prendre les mesures qu’il faut. Nous attendons d’ici à deux mois pour apprécier leur travail.
Alexandre Touré