Après sa mise à l’écart humiliante lors des obsèques de Ahmed Kathrada, le président sud-africain Jacob Zuma devait réagir d’une manière ou d’une autre. Et il l’a fait en excluant du nouveau gouvernement les ministres «non-acquis», notamment l’ex-ministre de finances Pravin Gordhan, détesté dans la garde rapprochée du président et apprécié de l’aile réformiste de l’ANC. Du coup, le chef de l’Etat fait désormais face à une levée de boucliers, aussi bien dans sa famille politique que dans l’opposition. Et l’on s’acheminerait ainsi vers une motion de défiance sans précédent au Parlement.
Les réformistes de l’ANC n’approuvent pas la nouvelle configuration gouvernementale impulsée par Jacob Zuma et ne cachent pas leur colère et certains appellent même à un sursaut pour sauver leur mouvement. Plusieurs fois empêché dans ses élans de «corruption ou népotistes», comme dirait ses détracteurs, le chef de l’Etat sud-africain a cru bon prendre ses responsabilités sur ce coup-ci, en mettant à la touche tous les ministres qui constitueraient des obstacles à son mode de gouvernance. Il a voulu ainsi en finir avec ces ‘’non acquis’’, à l’image de Pravin Gordhan qui se faisait ovationner aux obsèques de Ahmed Kathrada alors que Jacob Zuma y était déclaré persona non grata.
Depuis longtemps déjà, Gordhan ne rentrait plus dans la moule du régime et était devenu dans le même temps très populaire dans l’opinion et auprès des institutions financières internationales. Pour éviter de s’attirer la colère populaire et de provoquer l’effondrement des cours sur les marchés boursiers, le président Zuma a dû plusieurs fois renoncer au limogeage du puissant ministre des finances. Mais, après sa récente mise à l’écart humiliante lors des obsèques de Ahmed Kathrada, le chef de l’Etat a fini par prendre sa décision de se séparer de son ‘’encombrant’’ ministre, advienne que pourra.
Après tout, c’est Jacob Zuma le président élu. S’il semble ainsi avoir repris la main. Pourtant, la suite ne s’annonce pas aisée pour le chef de l’Etat qui est sur la sellette. Le plus dur commence visiblement pour lui. Surtout avec la perspective d’une nouvelle motion de défiance au Parlement. Si le président Zuma n’arrive pas à recoller à temps les morceaux avec l’aile réformiste de l’ANC, il court un gros risque de se retrouver en minorité au Parlement. Et ce sera le coup parfait pour le principal parti d’opposition, l’Alliance démocratique (DA) et le parti radical de Julius Malema, les Combattants pour la Liberté Economique, qui a tenté à plusieurs reprises sans succès d’éjecter Zuma du fauteuil présidentiel. A chaque fois, les parlementaires de l’ANC ont toujours su faire bloc derrière le chef de l’Etat. Mais, cette fois, les choses ne semblent pas être gagnées d’avance pour le président Zuma.
Mathias Lompo
Burkina Demain