Directeur des études au lycée Wend Manegda, à Ouaga 2000, Issiaka Kaboré est à la fois un acteur et un observateur avisé de l’éducation au Burkina Faso. M. Kaboré est également coach en administration scolaire et académique. Il aborde dans cet entretien les problématiques de l’école burkinabè, caractérisées cette année, par, entre autres, le terrorisme dans le Sahel, les faibles résultats scolaires. Il situe aussi les responsabilités dans ce recul du système éducatif et émet quelques pistes de solutions.
Burkina Demain : Quel bilan faites-vous au niveau de votre établissement de l’année scolaire qui vient de s’achever ?
Issiaka Kaboré : le bilan des résultats scolaires n’est pas satisfaisant. De plus en plus, les élèves n’ont plus le niveau requis. Cette culture studieuse a disparu dans l’univers scolastique.
Quel regard portez-vous sur les résultats au niveau national ?
Les résultats au plan national sont également faibles. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. 25% au BEPC et 35% au BAC. La situation est vraiment triste.
Mais, quelle est la responsabilité des enseignants dans cette situation ?
Leur responsabilité se situe au niveau du manque de motivation, de formation, de renforcement des capacités et du manque de vocation et d’ambitions.
Que faut-il faire pour que les enseignants jouent pleinement leur rôle de garants de la qualité des enseignements ?
Il faudra revoir à la hausse le coût de la vacation et le salaire des enseignants. Cela permettra aux enseignants d’être à l’abri des besoins primaires.
Au-delà des enseignants, il y a aussi la part de responsabilité des parents d’élèves…
A leur niveau, il y a le manque de suivi des enfants et l’insuffisance de l’éducation basique qui ne leur permet pas de jouer pleinement leur rôle de parents.
Certains pensent qu’il faut réintégrer, comme cela se faisait à l’époque, la chicotte à l’école. Etes-vous aussi pour cela ?
Absolument. Il faut réintégrer la chicotte à l’école. La chicotte est un instrument pédagogique.
Comment avez-vous vécu le problème de l’éducation au niveau du Sahel avec cette terreur qui a été exercée sur les acteurs de l’éducation par les terroristes et il y a même eu mort d’un enseignant ?
Les réalités de l’éducation au Sahel sont alarmantes. Les terroristes ont semé le désordre, la désolation, la psychose, l’abandon au niveau des populations, notamment des enseignants et des élèves. L’on ne peut pas travaillé dans ce contexte assez risqué.
Burkina Demain : Pensez-vous que l’Etat fait suffisamment pour protéger les enseignants dans l’exercice de leurs fonctions ?
Non.
Alors, qu’est-ce que l’Etat peut faire de mieux pour le monde de l’éducation ?
L’Etat doit faire de l’éducation une priorité absolue en ayant une vision claire. Il faudrait également améliorer les conditions de vie et de travail des enseignants. En outre, il faut garantir l’avenir des enseignants à travers des politiques qui militent en leur faveur: logement, santé, etc.
Vous êtes en vacances et la rentrée, c’est dans quelques mois. Quels défis pour la prochaine année scolaire ?
Les défis à relever pour l’année 2017-2018 sont : faire des reformes sur l’éducation; mener une politique de l’éducation; créer un cadre de concertation permanent et allier l’enseignement et l’éducation (éducation, civique et moral).
Entretien réalisé par Philippe Martin
Burkina Demain