Abdoulaye Sana, gérant et responsable à Lagazel

Au cœur de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP) dont la 23e édition se tient du 6 au 17  novembre à Bonn, se trouvent les énergies renouvelables qui contribuent énormément à la réduction des émissions des carbones et du réchauffement climatique. En Afrique, Lagazel, qui a lancé l’année dernière à Dédougou, au Burkina Faso, son usine de fabrication de lampes solaires, se pose déjà en leader en la matière. Dans cet entretien exclusif, Abdoulaye Sana, gérant de Lagazel, dresse le bilan de leur action depuis le lancement de leur usine le 13 octobre 2016.

Abdoulaye Sana, gérant et responsable d’import-export à Lagazel

Burkina Demain : Cela fait déjà un peu plus d’un an que Lagazel a lancé officiellement à Dédougou ses activités de fabrication de lampes solaires en Afrique. Comment se porte l’initiative ?

Abdoulaye Sana : La fabrication des lampes, jusque-là, s’est très bien déroulée. Nous avons atteint très rapidement nos objectifs en termes de volume de production et standard de qualité. En témoignent la certification Lighting Global et la conformité de nos produits aux normes européennes.

Côté commercial, les ventes ont démarré assez lentement sur la première année, mais des partenariats sont en train de se mettre en place sur le Burkina Faso. Par exemple, nos lampes sont disponibles chez CIC, Nafa Naana, Africa Tim, Actualité Energie et 3 point de CBENERGIE Dédougou, Bobo et Ouagadougou, ou encore chez des revendeurs à Kaya ou Tcheriba. Nous avons également collaboré avec des associations et ONG pour rendre accessibles les lampes à des élèves ou populations démunies.

Quel est le bilan global à ce jour ?

Après une année d’activité de l’atelier de fabrication à Dédougou, nous avons fabriqué plus de 40 000 lampes et distribué environ 10 000 lampes, essentiellement sur le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire. En chiffre d’affaires, cela fait  environs 150 millions de francs CFA. Nous avons une  vingtaine d’employés.
Vous vous étiez également engagés à éviter l’émission de 850 000 tonnes de CO2. Avez-vous une idée de ce qui a été fait à ce niveau ?

Le volume d’émissions de CO2 évité est lié au nombre de lampes solaires en utilisation, en remplacement des équipements traditionnels comme les lampes à pétrole. A ce jour, environ 10 000 lampes ont été distribuées par Lagazel, ce qui correspond environ à 6 200 tonnes CO2 évitées tout au long de leur durée de vie.

Votre initiative se voulait également sous- régionale, voire africaine. A part le Burkina, quels sont les autres pays d’intervention de Lagazel à ce jour ?

Nous avons des prospections en cours au Niger, Bénin, Togo, Ghana, Côte d’Ivoire et Mali, où nous recherchons encore des partenaires de distribution fiables.
Au Sénégal, nous venons d’ouvrir une filiale et commençons la distribution ce mois-ci. Nous allons tester le marché en commençant par la distribution des lampes depuis le Burkina Faso, avec l’objectif d’ouvrir un atelier localement. Cela reste notre objectif : implanter des ateliers de fabrication de produits verts, au plus proche des lieux de consommation.

Avec cette vocation sous- régionale affichée, cela signifie pour vous beaucoup de déplacements à l’étranger…

Effectivement, en tant que gérant de l’entreprise, s’occupant du volet commercial,  de l’import-export, je fais beaucoup de déplacements. Je suis présentement en France. Mais, avant ça, je me suis rendu à d’autres évènements à l’étranger. En 2016, j’ai été de la COP  22 à Marrakech, à Abidjan pour une livraison de lampes à un distributeur, à Cotonou pour une foire l’UEMOA, à Bamako visite des distributeurs. Pour cette année 2017, j’ai été à  Casablanca FENELEC et maintenant enFrance pour la visite de LAGAZEL France et société CHABANNE et Febak Bamako.

Je signale que nous démarrons également la commercialisation en Europe des lampes fabriquées au Burkina Faso, avec des offres d’achat solidaire pour les entreprises et les particuliers.

Alors, comment sont accueillis vos produits dans ces différents pays-là ?

Que ce soit au Burkina Faso ou dans la sous-région, les clients apprécient la robustesse de nos produits et constatent, après quelques mois d’utilisation, que nos lampes sont réellement durables. Ils sont également rassurés par le service après-vente que nous proposons à proximité.

Qu’est-ce qui fait la différence entre vos lampes et celles des autres ?

Nous sommes les seuls fabricants à proposer des produits en métal, donc très robustes, d’une durée de vie jusqu’à 10 ans.
Par ailleurs, nos lampes sont réparables. Notre modèle de fabrication permet de disposer de composants de remplacement, et proposer aux clients un service de réparation de qualité et à faible coût.
En Afrique, il y a ce problème de pauvreté qui fait que les gens n’ont pas toujours  les moyens de se procurer les produits comme les vôtres. Qu’est-ce qui est fait à votre niveau pour favoriser l’accès à vos produits ?

Notre volonté est de proposer des produits de qualité, durables, qui vont permettre à ces familles d’acquérir une solution d’éclairage pour le long terme. Au regard des dépenses habituellement consacrées à l’éclairage par les familles (achat de lampes souvent de faible qualité plusieurs fois par an, achat hebdomadaire de piles ou de pétrole…), les lampes LAGAZEL sont rentabilisées en quelques mois seulement. Ensuite, pendant 10 ans, l’utilisateur réalise des économies car il n’a plus aucune dépense: l’énergie solaire est gratuite !
Toutefois, la barrière de l’investissement initial reste importante pour les familles les plus pauvres. Nous collaborons donc avec les Caisses Populaires qui apportent des services financiers pour faciliter l’acquisition des lampes. Nous sommes également en partenariat avec l’entreprise sociale Nafa Naana  pour former, financer et accompagner une centaine de micro-entrepreneurs dans la distribution des lampes solaires, afin de les rendre accessibles à tous, partout au Burkina Faso.

Quel est le prix moyen de vos lampes ?

Les lampes KALO sont vendues à 13 000 CFA (modèle LK1500 pour l’éclairage) et 22 000 CFA (modèle LK3000 pour l’éclairage et la recharge de téléphone).

Rencontrez –vous d’autres difficultés ?

Les difficultés ne manquent pas.
Comme mentionné, les ventes restent limitées par rapport à nos ambitions d’industrialisation de la fabrication des lampes. Les consommateurs sont encore peu sensibilisés à la qualité, du fait des nombreux équipements solaires de faible qualité disponibles sur le marché.
Par ailleurs, les institutions ne privilégient pas encore la fabrication locale, qui pourtant permet de créer des emplois locaux qualifiés, et développer l’économie locale.
D’autre part, pour l’export, nous sommes confrontés à des problématiques logistiques. Le transport inter- africain est compliqué et coûteux.
Mais ces difficultés ne nous empêchent pas de rester optimistes, et de continuer notre développement.
Pour l’année 2018, quels sont vos ambitions en termes de fabrication, de vente ou d’initiatives ?

Des développements de nouveaux produits sont en cours. Nous prévoyons de faire évoluer notre gamme de lampes en 2018 et nous travaillons également à la conception de kits solaires avec plusieurs points d’éclairage et la possibilité d’alimenter de petits équipements électriques.
Sur le Burkina Faso, nous devrions développer dans les prochains mois des partenariats avec de grandes entreprises pour la commercialisation des lampes.
Par ailleurs, LAGAZEL va poursuivre son développement commercial dans la sous-région : Côte d’Ivoire où les ventes ont bien démarré via un partenaire de distribution, Sénégal où on vient d’ouvrir une filiale, et prospection en Afrique centrale pour la réplication d’un atelier pouvant approvisionner la zone.

Entretien réalisé par Grégoire B. Bazié

Burkina Demain

 

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