Le Burkina Faso n’est pas un accident de l’histoire. Les Burkinabè ne sont pas les damnés de la terre.  Le pays est certes confronté à d’immenses difficultés. Mais ce n’est pas pour autant qu’il faille jeter le bébé avec l’eau du bain. En dépit de toutes les prévisions apocalyptiques, le Burkina continue sa marche radieuse. 

 

Les lendemains seront encore enchanteurs pour peu que chacun s’assume et fasse preuve de patriotisme. Les élections de novembre 2020 en donnent  justement l’occasion.  C’est donc le moment de s’enrôler massivement pour contribuer à écrire une nouvelle page de l’histoire démocratique du pays.  Les jérémiades à longueur de journée, l’autoflagellation, le dénigrement permanent des autorités ne changeront pas le quotidien.  La carte d’électeur peut être une « arme de destruction massive».  Alors ? A l’enrôlement des citoyens !

L’année 2020 est une année électorale au Burkina Faso. Elle  sera marquée par les élections couplées présidentielle et législatives pour permettre au pays de consolider son processus démocratique. Ces élections sont un  enjeu majeur après celles de 2015  qui avaient permis au pays de renouer avec une vie constitutionnelle normale après l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 et la transition émaillée par un coup d’État manqué.  Les municipales sont prévues pour 2021.  Dans l’histoire des nations, les élections ont toujours été des moments cruciaux. C’est pour cette raison que la participation électorale revêt un intérêt particulier.

Au Burkina Faso, la participation électorale est relativement faible. Sur un potentiel de 7 à 8 millions d’électeurs, on enregistre environ 4,5 millions d’inscrits et 2,5 millions de votants au maximum.  Selon le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), lors de l’élection présidentielle  du 21 novembre 2010  par exemple, ce seuil n’a même pas été atteint. Sur un potentiel électoral de 7 à 8 millions de citoyens, 3,2 millions  se sont  inscrits et  seuls 1 778 693 ont voté.  Le taux de participation se situait à 54,90 %.

Pour les élections couplées législatives et municipales du 02 décembre 2012, sur 8 millions d’électeurs potentiels, ce sont 4 426 051 soit 55% de personnes qui se sont inscrites. Lors de l’élection présidentielle du 29 novembre 2015 selon les données publiées par la CENI, 5 517 015  électeurs étaient  inscrits sur la liste électorale. 3 309 988 ont exprimé leurs suffrages, soit un taux de participation de  près de 60 %.

La CENI a dénombré 191 293 bulletins nuls.  Ce taux de participation relativement élevé s’explique en partie  par le fait que c’était les premières élections post-insurrection et les premières aussi depuis 27 ans où le président sortant n’était pas candidat à sa propre succession.

Un bel engouement pour l’enrôlement

De façon générale,  l’abstentionnisme concerne au moins la  moitié des électeurs potentiels.  Pourtant, une forte participation électorale  peut être un tremplin pour la légitimation et la consolidation du processus démocratique. Du coup, pour les élections de 2020,  le défi majeur de la CENI est de passer d’un fichier électoral « squelettique » à un fichier électoral « conséquent ».

 

En termes clairs, il s’agit de parvenir à au moins 40% d’inscription des jeunes de 18-30 ans et à plus  de 50% d’inscription des femmes ; parce qu’elles représentent dans la tranche d’âge concernée par l’enrôlement, près de 70% de la population.

L’enrôlement a commencé le  3 février 2020. Suspendu pour cause de Covid-19, il a repris il y a quelques semaines.

 

Depuis le 23 juin, l’enrôlement concerne les populations du Kadiogo, du Houet, du Yatenga, du Sahel et de la Comoé.  Le 25 juin dernier, le Président de la CENI évoquait un bel engouement dans ces différentes localités.   Selon Newton Ahmed Barry : « Dans certains arrondissements de Ouagadougou et de Bobo Dioulasso nous avons journalièrement plus de 3000 inscrits ».

 

Même dans les zones difficiles comme Arbinda, Djibo, Gorgadji, Falagountou, Essakane, l’intérêt pour l’enrôlement est manifeste. Nous nous sommes personnellement enrôlés le 25 juin à  7h à Ouagadougou. L’opération a duré moins de 5 mn.

Nous sommes venus trouver des personnes du 3è âge qui étaient positionnées bien avant l’ouverture du centre d’enrôlement.  Des jeunes y affluaient aussi juste avant notre départ.  Même si l’enrôlement des jeunes et des femmes reste globalement timide,  la mobilisation citoyenne observée à travers le pays est un véritable signe d’espoir.

 

Agir pour des élections apaisées

A Ouagadougou et Bobo- Dioulasso, l’enrôlement se poursuit jusqu’au 09 juillet. C’est la dernière ligne droite ; en attendant des sessions spéciales pour les provinces en proie à l’insécurité.

Il appartient maintenant aux partis politiques, aux OSC, aux leaders religieux et coutumiers, à toutes les forces vives  d’appeler les Burkinabè à se faire enrôler.

Il faut toutefois le faire dans les règles de l’art, sans aucune intention de fraude comme cela a pu être constaté dans certaines localités. En la matière, il faut saluer la réaction de la CENI qui a permis de circonscrire rapidement les choses à Ziniaré.

Toute tentative de fraude doit être sévèrement réprimée au regard des textes en vigueur. Les  citoyens doivent s’approprier véritablement le  processus. Il ne faut pas se complaire dans l’inertie ou dans des procès en sorcellerie.

La conjugaison des différents efforts permettra d’éviter des crises pré ou post-électorales inutiles.  Sur le plan sécuritaire, il y a des signaux de plus en plus positifs ces dernières semaines avec la descente du Président du Faso à Djibo pour galvaniser les troupes,  la tournée du chef d’État-major général des armées auprès de ses hommes déployés sur les différents théâtres d’opérations,  la mission du

Président de l’Assemblée Nationale dans les régions fortement touchées par le terrorisme,… Le pays doit impérativement relever le défi d’élections apaisées, libres et transparentes en 2020. Nul ne doit se mettre en marge de ce noble combat.

 

Jérémie Yisso BATIONO

Enseignant chercheur

Ouagadougou

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