Pris entre les exigences de la CEDEAO et celles du Mouvement du 5 Juin, les responsables de la junte au pouvoir à Bamako, ne savent visiblement plus à quel saint se vouer. Ils vont devoir cependant opérer un choix cornélien : soit satisfaire les exigences de la CEDEAO et espérer la levée des sanctions de l’organisation régionale ; soit suivre la feuille de route proposée par le M5-RFP et se mettre à dos la CEDEAO. C’est toute la responsabilité qui incombe, en ce moment, à Assimi Goita, président de la junte et ses autres leaders.
C’est un fait. Les militaires qui se sont emparés du pouvoir à Bamako le 18 août dernier, sont désormais pris entre deux feux. Le feu de la CEDEAO qui exige une transition civile de 12 mois avec un président civil et un Premier ministre civil, assortie d’une possibilité de levée des sanctions dont les effets se feront de plus en plus sentir.
Et le feu du Mouvement du 5 Juin – Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP) qui préconise une transition civile d’au moins 18 mois, assortie d’une exigence partenariat en bonne et due forme avec la junte dans le cadre de la mise en œuvre de cette transition civile.
Le divorce étant consommé, avant même l’avènement du putsch, entre la CEDEAO, accusée de rouler pour le président déchu Ibrahim Boubacar Kéita dont elle exigeait le rétablissement dans ses fonctions de chef de l’Etat ; et le M5-RFP, convaincu de sa légitimité populaire et du rôle joué dans l’avènement du 18 août ; les deux propositions de transition (celle de la CEDEAO et celle du M5-RFP) semblent à priori inconciliables. Les éléments de la junte se retrouvent entre le marteau et l’enclume. Ils sont manifestement dans une impasse.
Tantôt, ils donnent l’impression de suivre les directives de la CEDEAO, d’où la libération du président IBK et la convocation samedi dernier des différents acteurs politiques pour discuter des contours de la transition, à l’annonce des décisions du sommet de la CEDEAO.
Tantôt l’on sent qu’ils veulent jouer la carte du M5-RFP, d’où, peut-être, la décision de surseoir in extremis à la rencontre avec les différents acteurs politiques, suite au communiqué du mouvement du 5 juin qui y a dénoncé sa non-invitation et l’initiative de rencontrer dans la foulée une délégation dudit mouvement à Kati.
Quoi qu’il en soit, chaque option qu’aura finalement à faire la junte dans la situation actuelle, aura ses avantages et ses inconvénients. Et en tant que détenteur actuel du pouvoir suprême au Mali, c’est à elle seule de décider en dernier ressort en tenant compte bien entendu des enjeux de l’heure et de l’avenir du pays. En état de cause, les responsables de la junte ont intérêt à sortir vite de cette impasse. Sinon, plus ils traîneront en sortir, moins ils auront le contrôle des évènements. Si le coup du 18 août a été aussi bien préparé comme cela a été dit, il n’y a pas de raisons que ses auteurs tergiversent encore sur la voie à suivre pour sortir le Mali de l’ornière.
Philippe Martin
Burkina Demain