«Quelle connerie la guerre! Je refuse l’idée qu’une guerre soit la solution à un conflit, elle n’est porteuse que de destruction… Je salue le courage de tous les Africains et le patriotisme de la jeunesse en ces temps de tensions et de troubles… il ne faut pas s’entretuer. Cette guerre est la conséquence des manœuvres silencieuses et souterraines de la géopolitique internationale, au nom des intérêts du monde des affaires et de la finance». C’est un extrait du texte de Yé Lassina Coulibaly dont voici l’intégralité.
«Quelle connerie la guerre! Je refuse l’idée qu’une guerre soit la solution à un conflit, elle n’est porteuse que de destruction…
Je salue le courage de tous les Africains et le patriotisme de la jeunesse en ces temps de tensions et de troubles.
A toutes les victimes du terrorisme et de l’échec de la diplomatie dans le Sahel, à tous ceux qui ont lutté pour la libération de l’Afrique : Paix à leur âme!
Je pleure sur le sort des innocents, les malades et les blessés, les enfants, le monde artisanal et agricole, les éleveurs, les travailleurs, les étudiants: tous sont pénalisés par ces tensions extrêmes qui planent sur les pays africains.
Nous ne sommes pas dupes, il ne faut pas s’entretuer. Cette guerre est la conséquence des manœuvres silencieuses et souterraines de la géopolitique internationale, au nom des intérêts du monde des affaires et de la finance.
Tous ceux qui accourent pour nous sauver, il ne faut pas se tromper, ce ne sont pas des sauveurs, ils viennent pour nos richesses en matières premières. Tous les pays émergents savent que c’est l’Afrique qui détient une grande partie des ressources de la puissance économique mondiale
La nouvelle génération de la jeunesse africaine est consciente de tout cela. Cette prise de conscience de la jeunesse ne date pas d’aujourd’hui, c’est la continuité des voix des grandes figures du panafricanisme, de Kwame Nkrumah, Ruben Um Nyobé, Modibo Keita à Patrice Lumumba et Thomas Sankara… Nelson Mandela, Mongo Beti, Niousséré Kalala Omotundé, Norbert Zongo, Boukari Yabara, Cheikh Anta Diop, Aimé Césaire, etc…
Les puissances économiques mondiales ont peur de cette jeunesse informée et instruite, c’est pour cela qu’ils créent des stratégies afin de déclencher et entretenir des conflits entre Africains. En outre, ils en tirent des bénéfices en vendant des armes aux belligérants… Il est ensuite facile de condamner les violences dans les instances internationales et de garder la main sur l’Afrique. C’est un jeu stratégique auquel se livrent de nombreuses puissances économiques, tous continents confondus…
On ne peut pas ignorer de tels soulèvements populaires au Niger, mais aussi au Mali, Burkina-Faso, Guinée-Conakri, Sénégal…
Tous les pays africains doivent vraiment être unis afin de faire respecter leur souveraineté. Ce que l’on entend c’est un discours mensonger destiné à cacher les vraies, mais inavouables, réalités, afin de polluer la sensibilité de l’opinion publique internationale, de sorte qu’elle se détourne de l’Afrique. Les dirigeants de ce monde doivent dire la vérité, cesser de détruire les peuples, par la ruse, d’appauvrir les populations, d’arracher les richesses au profit d’une poignée de personnes.
Il ne faut pas oublier la contribution des Africains à la libération de la France au cours des deux dernières guerres mondiales. Au nom du sang versé, il faut dépasser les intérêts de domination liés à la colonisation: ce serait une légitime et respectueuse reconnaissance…
On dit que les Africains n’ont pas fini de grandir: c’est faux, ils ont une énorme maturité. On n’a pas attendu l’Occident pour entrer dans l’histoire de l’humanité: les astronomes qui ont créé le premier calendrier de l’histoire humaine, adopté ensuite par les Romains, ne sont-ils pas Egyptiens? La Charte du Manden, promulguée en 1236 au Mali, qui établissait les règles d’une organisation sociale respectueuse des droits humains et interdisait l’esclavage, n’est-elle pas un formidable exemple de maturité et un témoignage de civilisation avancée?
Nous sommes les héritiers de cette culture ancestrale de l’Afrique qui n’a jamais exprimé d’animosité à l’égard des autres civilisations. Au contraire, elle prône le partage, la solidarité, la fraternité…
Quand la vérité éclatera, les peuples des autres continents soutiendront la cause africaine, car nous sommes tous concernés par les droits humains
En Afrique de l’Ouest, le réveil des consciences est en marche, grâce au travail acharné de militants, d’intellectuels visionnaires, d’artistes qui ont, depuis les années 60, fait un travail de titan, parfois au prix de leur liberté, et de personnes actives sur le terrain. Personnellement, j’ai toujours témoigné par mon travail artistique et les textes de mes albums de mes réflexions et préoccupations envers les épreuves et l’avenir de l’Afrique…
Il faut comprendre ces mouvements de ras le bol de la jeunesse qui sont l’expression d’un rejet de la politique française en Afrique francophone, politique empreinte d’une forme de condescendance et de mépris.
Cela fait trop longtemps que l’on est sous la tutelle de tout le monde, c’est vécu comme une ingérence que personne ne supporte plus. La jeunesse a raison de crier haut et fort son exaspération face aux postures coloniales encore en vigueur. Par ailleurs, il est intéressant de constater que, pour la première fois, le positionnement des Etats Unis d’Amérique vis à vis de l’ Afrique apparait au grand jour dans les médias.
L’Afrique doit pouvoir se positionner sur l’échiquier international et est en train de s’organiser afin de peser sur les marchés mondiaux dans tous les domaines.
Néanmoins, certains Africains, ou sociétés secrètes, n’ont pas la même vision du progrès et du développement; ils ne sont pas clairs en raison de leur idéologie religieuse ou philosophique. Cela entretient un désaccord profond: il y a ceux qui croient en un avenir meilleur pour les Africains et les traitres qui sont défaitistes, craignent de perdre des avantages et mangent avec les nombreux ennemis de l’Afrique.
Je fais appel à tous les intellectuels pour aider à libérer la parole, à mettre des mots sur les humiliations et les blessures du passé, pour partager leur connaissance de l’histoire et de la politique afin d’éclairer et faciliter la compréhension de ce qui se passe, pour être force de propositions permettant de se projeter concrètement vers un avenir digne et prospère pour l’Afrique. Il faut pouvoir apporter des réponses afin d’apaiser la colère et de la transformer en force de changement plutôt qu’en violence destructrice.
Une telle mobilisation mérite que l’on aide les jeunes, qui sont l’espoir de demain, à penser l’avenir autrement, à cheminer mentalement vers le temps de la diplomatie. C’est pourquoi l’Afrique a besoin de tous ses brillants cerveaux, à l’intérieur ou à l’extérieur, pour se construire et créer son propre modèle de gouvernance
Malgré nos différences, malgré les conflits d’intérêt, nous avons tous les mêmes besoins vitaux, partageons tous les mêmes valeurs. On a tous besoin les uns des autres. Le rêve pour demain serait de voir cohabiter en harmonie avec la nature les humains de toutes origines. Prendre soin de la faune et de la flore, protéger la nature, comme le faisaient nos ancêtres, devrait constituer un objectif commun, de plus en plus essentiel à la survie de l’humanité.
C’est le temps du renouveau de l’Afrique!
Yé Lassina Coulibaly»